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Vin luxembourgeois : les années sèches, meilleurs millésimes ?


Les dernières vraies pluies sont tombées début juin… (Photo : erwan nonet)

On considère généralement que les années sans pluie permettent de créer les plus grands vins. C’est en partie vrai, mais ce n’est pas aussi simple que cela…

Dans le Bordelais, on en a fait une règle intangible : les millésimes chauds et secs font les grandes années. 1893, 1900, 1945, 1947, 1959, 2010 et 2018 sont considérées comme des étiquettes légendaires, or ces années ont toutes connu leur période de canicule et un faible cumul de précipitations. Pourtant, dans cette liste, on note d’emblée qu’il manque une année particulièrement chaude : 2003. On attendait énormément de l’année de la canicule qui, finalement, restera davantage dans les annales pour ses records climatiques que pour la qualité de ses vins. Certains demeurent très bons (notamment les liquoreux et les rouges produits par de vieilles vignes sur les meilleurs terroirs), mais il est impossible d’en tirer une conclusion générale tant les résultats ont été hétérogènes.

Tristan Duval, meilleur sommelier du Luxembourg 2016 et responsable de la vinothèque de La Provençale, a également constaté qu’en 2003, les bourgognes n’étaient pas toujours transcendants non plus. «Beaucoup d’amateurs attendaient un très grand millésime mais, au final, après quelques années, beaucoup de ces vins étaient oxydés parce que les raisins ont eu trop chaud.»

Ce constat vaut également au Luxembourg, qui a également connu une météo 2003 historique. Globalement, les vins ont déçu. Grisés par une situation alors exceptionnelle, les vignerons ont parfois cherché à atteindre les maturités les plus élevées. Mais cette quête s’est réalisée au détriment de l’acidité naturelle des raisins, qui détient les clés de l’équilibre et de la structure des vins. Très riches, trop riches, beaucoup de crus se sont effondrés après quelques années de garde. Si on osait la comparaison, on dirait que 2003 a engendré plus de bodybuilders adeptes de la gonflette sous stéroïdes que de sportifs de haut niveau bien musclés. Mais comme toujours, il y a des exceptions! Le vigneron Armand Schmit (Domaine Schmit-Fohl, à Ahn) garde en mémoire «un riesling qui est toujours très bon aujourd’hui!».

«Cette année est extrême»

Le vigneron, qui a désormais cédé les clés de son domaine à ses fils Nicolas et Mathieu, est toutefois inquiet lorsqu’il évalue la situation actuelle. «C’est vrai qu’une année sèche est plus intéressante qu’une année humide, mais il y a des limites… Les dernières vraies pluies que nous avons enregistrées datent du début du mois de juin avec une vingtaine de litres de précipitations au mètre carré, autant dire pas grand-chose. En mai, nous avons eu une fois 13 litres, avec la chance que la plante était alors en pleine croissance et qu’elle en avait besoin. Mais depuis, plus rien. Cette année est extrême, on atteint les limites de la plante. Un léger stress est profitable à la vigne, c’est vrai, mais il ne faut pas la traumatiser non plus.»

Les vieilles vignes qui ont eu le temps de faire plonger profondément leurs racines dans le sous-sol ne souffrent pas encore du manque d’eau. Mais les jeunes sont arrosées depuis plusieurs semaines pour les maintenir en vie. «Il faudrait 40 litres pour que cela serve vraiment à quelque chose, ajoute Armand Schmit. Le sol est tellement sec que l’eau mettra du temps à s’imprégner en profondeur et, avec la chaleur, une bonne partie de la pluie s’évaporera avant de profiter à la plante.»

Mais l’histoire n’est pas condamnée à se répéter et les vignerons qui ne connaissaient pas l’effet d’une canicule sur le vin en 2003 ont désormais beaucoup plus d’expérience. Bien que les maturités aient encore été très hautes en 2018, globalement, les vins sont nettement meilleurs. «Nous avions encore attendu un peu trop longtemps, reconnaît Armand Schmit. Il vaut mieux un pinot noir à 95 degrés Oechsle (NDLR : l’unité de mesure du taux de sucre) qu’à 105. Nous savons désormais que lors d’une année comme celle-ci, il est préférable de jouer sur l’acidité que sur la richesse en sucre.»

À six semaines environ des vendanges, toutefois, rien n’est évidemment joué. Sûr qu’un mois d’août extrêmement sec poserait problème, mais il suffirait de quelques averses bien senties ces prochaines semaines pour que les vignes mosellanes se réjouissent. Un peu comme celles qui ont arrosé nos voisins allemands jeudi dernier, par exemple…

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