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Policier, espion : il multiplie les usurpations


Raphaël a fait irruption chez un coiffeur en se présentant comme un policier. (Photo : Sophie Kieffer)

Après avoir joué aux policiers et aux espions, Raphaël a joué à l’homme invisible vendredi face à la chambre correctionnelle qui devait le juger pour usurpation de fonction.

«Je n’ai jamais vu un membre de la police judiciaire avec cette allure-là et je suis déjà depuis longtemps dans le métier», lance la présidente de la 13e chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg vendredi matin à Stéphane. «Un membre de la police judiciaire a une plaque pour s’identifier.»

Ce patron-coiffeur a été menacé dans son salon de coiffure par un homme se faisant passer pour un policier de la police judiciaire. On ne saura jamais quelle tête a Raphaël, puisqu’il ne s’est pas présenté à l’audience vendredi matin, bien qu’il soit a priori habitué au fonctionnement de la justice. «Son casier judiciaire fait huit pages», note la présidente. Raphaël devait être entendu pour deux faits différents.

Le premier, impliquant le coiffeur, a eu lieu dans l’après-midi du 3 juillet 2020 dans un salon de coiffure de la rue du Nord à Luxembourg. «Je coupais les cheveux à un client quand une ancienne employée et un homme sont entrés dans mon salon de coiffure», se souvient Stéphane à la barre. L’employée voulait récupérer des affaires personnelles que son ancien employeur, las de les conserver, avait confiées à son avocat.

«L’homme a prétendu faire partie de la police judiciaire», poursuit le témoin. «J’ai demandé au couple de mettre un masque. On était en plein dans les mesures sanitaires et ils n’en portaient pas. L’homme m’a dit que les membres de la police judiciaire n’avaient pas besoin d’en porter.» Raphaël, voyant que le coiffeur ne se laissait pas intimider, a alors menacé Stéphane. «Il a dit qu’il me connaissait et qu’il savait où j’habite.»

Une bonne peur pour sa victime

Le coiffeur et une de ses employées venue lui prêter main-forte ont demandé au couple de quitter les lieux, mais Raphaël a à nouveau fait valoir sa fausse fonction. Ce n’est que quand Stéphane a appelé les «vrais» policiers que Raphaël a quitté les lieux. «Il a donné un coup dans la vitrine de mon commerce et il a fait le signe de me trancher la gorge», raconte le coiffeur qui a dit avoir vérifié ses arrières pendant des semaines après les faits. «Je changeais chaque jour d’itinéraire pour rentrer à mon domicile.»

Stéphane en a été quitte pour une bonne peur. Il s’est porté partie civile et a demandé 1 500 euros de dommages et intérêts par le biais de son avocat. Son ancienne employée n’aurait récupéré ses affaires que des mois plus tard.

Quelques mois après ces premiers faits, en novembre 2020, Raphaël se serait à nouveau fait passer pour ce qu’il n’est pas. Cette fois, il a laissé le costume de policier au placard pour endosser celui d’un membre du SREL, le service de renseignement de l’État. À Differdange, «il pète un câble sans raison», selon la représentante du ministère public, et détériore la porte d’entrée de la maison d’un voisin de sa compagne, l’ancienne employée de Stéphane, en y lançant notamment une poubelle.

Une jurisprudence à son nom

Le voisin en question n’a pas non plus jugé utile de se déplacer au tribunal vendredi pour donner sa version des faits. Aux policiers, il avait indiqué à l’époque que Raphaël avait prétendu être un espion après que le voisin s’est inquiété pour sa porte. «Quelqu’un qui travaille aux services secrets ne dit pas qu’il y travaille», s’étonne la présidente de la chambre correctionnelle.

Le prévenu, lui, aime apparemment bien dire où il ne travaille pas. «Son loisir est de se faire passer pour ce qu’il n’est pas», note la représentante du parquet. «Et de menacer les gens», complète la présidente. Raphaël est, entre autres, accusé «d’immixtion dans des fonctions publiques». «Il a utilisé une fonction qui n’est pas la sienne pour intimider une victime» et pour tenter d’obtenir une action de sa part, rappelle la magistrate.

Et il n’en serait pas à son coup d’essai : une jurisprudence de 2009 porterait même son nom. À l’époque, il avait été condamné pour avoir circulé avec un gyrophare de police sur sa voiture, indique-t-elle avant d’ajouter que le prévenu a été condamné cette année à une peine de prison assortie d’un sursis probatoire avec obligation de suivre un traitement. Elle a conclu à l’usurpation d’identité et a requis une peine de 12 mois de prison ferme et une amende appropriée.

Le prononcé est fixé au 7 juillet.

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