Face aux crises qui s’enchaînent, le secteur de l’artisanat luxembourgeois tient bon. Mais pour combien de temps? La Chambre des métiers pointe de nombreuses menaces qui pèsent sur les entreprises et dit même redouter une prochaine vague de faillites.
Après une année noire en 2020, marquée par la chute d’activité la plus abrupte jamais observée depuis 1986, le secteur de l’artisanat, premier employeur du Luxembourg avec 20% de l’emploi total, a profité de la relance en 2021, malgré la crise sanitaire, pour retrouver son niveau d’avant pandémie.
Ainsi, sur la période, le nombre d’entreprises artisanales a grimpé de 5,4% et le nombre d’emplois de 4,4%, en partie «grâce à un effet de rattrapage et au timide redémarrage de l’économie», estime le directeur général de la Chambre des métiers, Tom Wirion.
Cependant, si les résultats sont encourageants dans l’ensemble, certains clusters comme l’alimentation (boulangerie-pâtisserie, boucherie-charcuterie, traiteur) ou les soins à la personne (coiffure, esthétique), ont été beaucoup plus impactés que d’autres, et les défis qui s’annoncent sont autant de menaces pesant sur les 8 500 entreprises et les 103 000 emplois que représente le secteur.
L’accord tripartite : «une bouffée d’oxygène»
La perte de productivité tout comme l’absence des salariés au travail a «considérablement fragilisé les entreprises et toute une série d’effets secondaires les a frappées dans le sillage de la crise sanitaire elle-même», indique Tom Wirion, qui cite pêle-mêle la pénurie de matériaux due aux ruptures des chaînes d’approvisionnement, des délais de livraison devenus totalement imprévisibles, la forte hausse des prix de matières premières comme le bois ou certains métaux, et plus récemment, l’explosion des coûts énergétiques, etc.
Sans oublier l’inflation, à plus de 6% en mars dernier en réaction aux tensions internationales, et avec elle, le déclenchement de l’indexation des salaires, faisant mécaniquement grimper la masse salariale. Un coup dur supplémentaire pour les artisans, dont le gros des troupes (77%) est formé par des micro-entreprises – moins de neuf salariés.
Sur ce point, le directeur général salue la modulation retenue par l’accord tripartite, une «vraie bouffée d’oxygène» qui permettra à la fois aux artisans de mieux planifier leurs dépenses et de «briser la spirale prix-salaires» qui aurait pour effet de dégrader davantage la compétitivité.
Trésorerie en souffrance et perte de rentabilité
Or, les leviers à activer ne sont pas nombreux : les entreprises sont contraintes d’augmenter leurs prix, quitte à perdre des clients, mais aussi de rogner sur leurs marges, stoppant tout projet d’investissement.
Conséquences : la trésorerie est en souffrance, les sociétés accusent une perte de rentabilité car le prix payé par le client ne couvre plus tous les frais désormais, et les réserves financières s’épuisent. Un constat amer pour la chambre professionnelle qui ne cache pas son inquiétude et dit redouter une potentielle vague de faillites et licenciements prochainement.