Le G20 Finances s’ouvre vendredi à Venise, avec en haut de l’agenda la réforme de la taxation des multinationales, qui ambitionne de mettre fin aux paradis fiscaux et au dumping fiscal en instaurant un impôt mondial d’au moins 15% sur les bénéfices.
Les pays du G20 ont déjà tous adhéré au cadre général de la réforme sous l’égide de l’Organisation de développement et de coopération économique (OCDE), le 1er juillet, mais ils doivent désormais afficher « un accord politique » pour l’endosser.
Selon un projet de communiqué encore en discussions à Venise, les grands argentiers des pays les plus riches du monde et de l’Union européenne devraient « approuver » cet accord « historique sur une architecture fiscale internationale plus stable et plus équitable ».
Négociée depuis des années, cette réforme porte sur deux piliers : l’instauration d’un taux minimal mondial et un système visant à répartir de manière plus juste l’impôt sur les multinationales en fonction des bénéfices réalisés dans chaque pays, indépendamment de leur établissement fiscal. Ce dernier volet concerne surtout les géants d’internet, les fameux Gafa (Google, Amazon, Facebook et Apple), enclins à pratiquer l’optimisation fiscale en établissant leur siège là où l’imposition est la plus faible.
La fin des paradis fiscaux ?
Les ministres devraient aussi adresser un appel aux pays récalcitrants, la déclaration ayant été signée jusqu’à présent par 131 des 139 membres du groupe de travail dit du « cadre inclusif » de l’OCDE qui réunit pays avancés et émergents.
Manquent à l’appel l’Irlande, la Hongrie, l’Estonie, le Nigeria, le Kenya, le Sri Lanka, la Barbade et Saint-Vincent-et-les-Grenadines qui pratiquent tous de faibles taux d’imposition pour attirer les multinationales.
Un premier accord au G7 début juin à Londres avait donné un coup de fouet aux négociations, enlisées pendant la présidence de Donald Trump et relancées par l’arrivée de Joe Biden à la Maison Blanche. Le ministre britannique des Finances Rishi Sunak, dont le pays préside le G7, a appelé vendredi ses homologues du G20 à « se mobiliser » et « faire en sorte que les derniers détails de l’accord soient réglés d’ici octobre ».
Plusieurs pays, dont les États-Unis et l’Allemagne, sont favorables à un taux supérieur à 15% mais ils se font peu d’illusions : « il faut être réaliste, d’autres nations ont déjà du mal avec ce taux » donc a priori il devrait rester inchangé, a estimé un responsable gouvernemental allemand.
Mais est-ce vraiment la fin des paradis fiscaux ? Certains experts comme Giuliano Noci, professeur de stratégie à l’école Polytechnique de Milan, restent sceptiques. « Les taux fixés par les différents pays peuvent toujours sensiblement varier, et l’optimisation fiscale restera donc au cœur de la stratégie des géants de la technologie et des autres multinationales », a-t-il déclaré.
Soutien aux pays démunis
Le G20 devrait soutenir en outre l’initiative du Fonds monétaire international (FMI) d’augmenter l’aide aux pays les plus vulnérables, sous la forme d’une nouvelle émission de droits de tirage spéciaux (DTS) d’un montant de 650 milliards de dollars. Cette augmentation des réserves, « la plus élevée de l’histoire » du FMI, « constitue une bouffée d’oxygène pour le monde », a déclaré sa directrice générale, Kristalina Georgieva. Elle devrait être effective d’ici la fin août.
Les dirigeants du G7 avaient annoncé lors de leur sommet en juin vouloir mobiliser 100 milliards de dollars de cette émission pour aider les pays défavorisés, surtout en Afrique, à rebondir après la pandémie. Selon le projet de communiqué, le G20 appelle de ses vœux « des contributions de tous les pays en mesure de le faire pour atteindre un objectif ambitieux en faveur des pays vulnérables », sans fixer toutefois un montant.
Un moratoire sur le paiement des intérêts de la dette des pays les plus pauvres a été décidé par le G20 en avril 2020 et prolongé lors de la dernière réunion en avril 2021 jusqu’à la fin de l’année. En novembre 2020, une nouvelle étape a été franchie avec l’adoption par le G20 d’un « cadre commun » pour alléger le fardeau de la dette. Depuis, le Tchad, l’Éthiopie et la Zambie ont demandé une restructuration de leurs dettes.
LQ/AFP