Lourdement critiqué pour sa maladresse au début de l’Euro, l’avant-centre Alvaro Morata aura tous ses repères en demi-finale, mardi (21 h) à Londres : l’Espagne y retrouve l’Italie et sa redoutable charnière turinoise formée par Giorgio Chiellini et Leonardo Bonucci, partenaires de Morata à la Juventus.
Après avoir brisé sa malédiction avec le but de la délivrance contre la Croatie en huitièmes (5-3 a.p.), Morata arrive en terrain connu dans la capitale britannique.
Passé par le club londonien de Chelsea (2017-2019), l’avant-centre va tenter d’exploiter sa connaissance de la paire Chiellini-Bonucci pour propulser l’Espagne vers sa première finale depuis 2012.
Mardi, le joueur formé au Real Madrid et prêté par l’Atletico Madrid à la Juventus a une autre mauvaise série à rompre : contre Bonucci et Chiellini, les deux éternels piliers de la Juve et de la « Nazionale », Morata n’a jamais marqué le moindre but, que ce soit avec l’Espagne à l’Euro-2016, le Real ou l’Atletico en Ligue des champions.
« Quand on se retrouve côte-à-côte, comme on se connaît par cœur, tout devient plus naturel. Ensemble, on partage aussi le leadership », a convenu Bonucci lundi en conférence de presse.
« Alvaro est avant tout un ami à Turin, on est souvent ensemble. Ce qu’il a subi, ça m’a beaucoup touché. Alvaro est un grand ami, un grand footballeur. Un attaquant total, il sait s’insérer, aller en profondeur, sait gérer la couverture de balle.. c’est l’un des meilleurs avant-centres du monde. Heureusement, pendant la saison, je l’ai dans mon équipe. Demain (mardi) soir, il faudra que tout le monde soit très vigilant », a alerté Bonucci.
Histoire passionnelle
L’histoire passionnelle entre Morata et la Juve remonte à 2014, date de son premier passage en Italie. Né et formé à Madrid, entre l’Atletico, Getafe et le Real, Alvaro Morata a trouvé à Turin une ville d’adoption qu’il adore.
Fin avril, il assurait qu’il « resterait à la Juve pour la vie s’il en avait la possibilité, mais tout le monde sait que le football est un business et que nous n’avons souvent pas les moyens de choisir ».
Son attachement à la ville en fait un équipier modèle apprécié dans le vestiaire, et son engagement irréprochable a convaincu la Juve de prolonger son prêt d’un an (il appartient toujours à l’Atletico Madrid), avant un éventuel achat en 2022.
Mais, comme les aficionados de la « Roja », les tifosi bianconeri, qui l’ont retrouvé en octobre après quatre ans de séparation, entretiennent une relation ambiguë avec l’attaquant espagnol, dont la trajectoire en Italie comme en Espagne a longtemps ressemblé à des montagnes russes.
Surnommé « alVAR Morata » pour son nombre éloquent de buts marqués en position de hors-jeu en début de saison, il s’est peu à peu éteint quand la star Cristiano Ronaldo est revenue sur les terrains après avoir contracté le Covid-19.
Rendez-vous manqués
Avec 20 buts toutes compétitions confondues (contre 15 en 2014-2015 et 12 en 2015-2016, ses deux premières saisons turinoises) et 10 passes décisives, Morata sort de sa plus belle année en Italie… mais sa discrétion lors des grands rendez-vous lui a souvent été reprochée.
Il a notamment manqué une occasion importante en huitième de finale retour de Ligue des champions, synonyme d’élimination contre Porto, et n’a inscrit aucun but dans les duels décisifs de championnat contre l’Inter Milan, l’AC Milan, l’Atalanta Bergame ou Naples.
Les mêmes reproches qu’avec l’Espagne, en somme : après avoir raté un nombre incalculable d’occasions contre la Suède et la Pologne, et un penalty contre la Slovaquie en poules, Morata a peu à peu vaincu la malédiction en entrant dans les matches couperets… et a fait taire les critiques, passant du statut de boulet à celui de héros contre la Croatie.
De quoi peut-être oublier les sarcasmes et même les menaces de mort dont il a fait l’objet. De quoi justifier aussi la confiance inébranlable de son sélectionneur Luis Enrique, qui voit en lui « un grand joueur qui fait énormément de choses bien en attaque et en défense ».
Pour l’ex-international italien Demetrio Albertini, Morata est le « danger n° 1 » mardi. « Il ratera des choses, mais il a l’expérience, la classe et il est habitué à gagner », a-t-il assuré à La Gazzetta dello Sport.
Entre l’Espagne et l’Italie, l’histoire des confrontations a prouvé qu’il n’y avait pas d’amis sur le terrain: soit la charnière Chiellini-Bonucci fera trembler Morata, soit Morata risque de faire trembler les filets.
AFP/LQ