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La chrétienne Asia Bibi a quitté le Pakistan


Après l'acquittement d'Asia Bibi, des milliers d'islamistes du groupe Tehreek-e-Labaik Pakistan (TLP) avaient bloqué trois jours durant les principaux axes du pays pour exiger sa pendaison, le blasphème étant une question incendiaire au Pakistan. (photo AFP)

La chrétienne Asia Bibi a quitté le Pakistan, a indiqué mercredi un cadre du gouvernement pakistanais, plus de six mois après avoir été acquittée d’une condamnation à mort pour blasphème qui avait suscité l’indignation à l’étranger.

« Asia Bibi a quitté le Pakistan de son plein gré », a déclaré cette source, qui a requis l’anonymat. Plusieurs médias pakistanais avaient annoncé la nouvelle mercredi matin.

L’avocat de la chrétienne, Saif ul Mulook, tout en admettant ne pas avoir parlé directement à sa cliente, a indiqué avoir compris après s’être entretenu avec ses propres « sources » qu’elle était au Canada, où ses filles ont fui il y a plusieurs mois, selon plusieurs sources diplomatiques.

Le ministère des Affaires étrangères canadien s’est refusé à tout commentaire. Les autorités pakistanaises ne se sont pas prononcées officiellement sur sa destination ou les conditions de son départ.

La Première ministre britannique, Theresa May, devant la Chambre des Communes, a toutefois semblé suggérer qu’Asia Bibi se rendait bien au Canada.

« Le Canada a fait cette offre et nous pensions qu’il était juste et approprié que nous (la) soutenions », a-t-elle affirmé, tout en saluant les informations selon lesquelles Asia Bibi « a pu voyager librement » et peut maintenant « prendre des décisions concernant son propre avenir ».

Plusieurs sources sécuritaires au Pakistan ont également déclaré que la chrétienne était partie au Canada.

Mi-novembre, le Premier ministre canadien Justin Trudeau avait indiqué être « en discussions avec le gouvernement du Pakistan » au sujet d’Asia Bibi.

Asia Bibi avait été condamnée à mort pour blasphème en 2010, après avoir été accusée par deux villageoises musulmanes avec qui elle travaillait d’avoir « insulté » le prophète Mahomet lors d’une querelle autour d’un verre d’eau.

« Soulagement »

Son cas était devenu emblématique des dérives de la loi sur le blasphème au Pakistan, souvent instrumentalisée selon ses détracteurs pour régler des conflits personnels via la diffusion de fausses accusations.

« C’est un grand soulagement que cette épreuve honteuse soit enfin arrivée à son terme et qu’Asia Bibi et sa famille soient en sécurité », a déclaré Omar Waraich, directeur adjoint du programme Asie du Sud d’Amnesty International.

« Elle n’aurait jamais dû être emprisonnée, et encore moins subir les menaces constantes qui pèsent sur sa vie », a-t-il poursuivi, appelant à « abroger » la loi sur le blasphème au Pakistan.

Asia Bibi, ouvrière agricole chrétienne âgée d’une cinquantaine d’années, avait fini par être acquittée en octobre par la Cour suprême pakistanaise, la plus haute instance judiciaire du pays, après avoir passé plus de huit ans dans les couloirs de la mort.

Après son acquittement, des milliers d’islamistes du groupe Tehreek-e-Labaik Pakistan (TLP) avaient bloqué trois jours durant les principaux axes du pays pour exiger sa pendaison, le blasphème étant une question incendiaire au Pakistan.

Cette même Cour suprême l’avait ensuite définitivement blanchie en janvier en rejetant un recours contre son acquittement.

Depuis lors, Asia Bibi était vraisemblablement gardée en résidence surveillée, les conditions de son séjour ces derniers mois n’ayant pas été explicitées par Islamabad.

Le sort d’Asia Bibi a eu un retentissement international, attirant l’attention des papes Benoît XVI et François. L’une de ses filles a rencontré ce dernier à deux reprises.

« Asia Bibi est enfin libre », s’est réjouie une association de chrétiens britanniques d’origine pakistanaise (British Pakistani Christian Association), qui dit s’être impliquée dans l’affaire Asia Bibi.

« La plus célèbre victime de la loi pakistanaise sur le blasphème a finalement été libérée de son pays natal, où elle est devenue la figure la plus détestée du pays, bien que les tribunaux l’aient exonérée des fausses accusations qui l’avaient maintenue en cellule d’isolement pendant presque 10 ans », a poursuivi cette association dans un communiqué.

Les chrétiens, qui comptent pour environ 2% de la population pakistanaise majoritairement musulmane, constituent l’une des communautés les plus déclassées du pays. Ils vivent souvent dans des bidonvilles et se voient offrir des emplois peu rémunérés de balayeurs, agents d’entretien ou cuisiniers.

AFP

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