Accueil | A la Une | Luxembourg : Flëpp, boulanger révolutionnaire

Luxembourg : Flëpp, boulanger révolutionnaire


Philippe Calon, le boulanger de la rue de Reims, est aussi galeriste. (Photo Julien Garroy)

Philippe Calon est boulanger-pâtissier depuis 50 ans. Au fil du temps, son magasin du quartier Gare s’est transformé en galerie de peinture cubaine.

Une boulangerie dans un quartier chaud ? Rien de plus naturel dans le cas de Philippe Calon et de sa «boulangerie logique». Logique ? Tout à fait. Nichée rue de Reims, au cœur du quartier de la Gare connu pour ses établissements de nuit et ses hôtels bon marché, la boulangerie de Philippe («Flëpp») a dû retirer l’appellation «biologique» après la visite d’un inspecteur qui l’estimait non conforme à la réglementation européenne. «Un Allemand…», soupire Philippe Calon.

S’étant toujours considéré comme un des pionniers du bio au Luxembourg et ne pouvant par conséquent accepter cette sentence, Philippe Calon, pour envoyer un bras d’honneur à Bruxelles, a biffé sur sa marquise le «bio» dans «boulangerie biologique» pour devenir la seule boulangerie «logique» du pays, ce qui arrange bien le septuagénaire, qui est également le seul boulanger-pâtissier casher à Luxembourg, et aussi «le seul converti» au judaïsme.

L’éveil spirituel lui serait venu lors d’un voyage en Israël, où il avait accompagné sa sœur. À son retour, il est allé voir le rabbin, qui essaiera d’abord de le dissuader de se convertir comme le veut la coutume. Mais l’insistance de Philippe Calon paye, si bien qu’il est aujourd’hui membre de la communauté. La maison rue de Reims dans laquelle il exerce son activité de boulanger-pâtissier appartenait d’ailleurs à une dame juive, rescapée des camps, nous apprend Philippe Calon.

Le métier de boulanger-pâtissier, Philippe Calon l’a appris à son retour de France, où il a passé ses années de lycée. Né à Esch-sur-Alzette d’une mère luxembourgeoise, Philippe Calon reviendra dans sa patrie en 1957 pour devenir barman chez Walter, un milkbar qui était situé au rez-de-chaussée du désormais célèbre immeuble du n°49 boulevard Royal, seule construction à être restée debout au cœur du chantier, et où il rencontrera également sa future épouse.

Ami des grands de ce monde

Parmi les clients, un certain Robert Goebbels, qu’alors personne ne connaissait encore : «Il faisait sa politique chez nous», se souvient Philippe Calon, qui travaille ensuite comme boulanger, rue de la Boucherie dans la Ville-Haute. Jusqu’au jour où il reçoit un appel en provenance du Palais grand-ducal adjacent : «Philippe, ta fumée me tombe dans le bureau» lui aurait appris le Grand-Duc Jean.

Depuis cette époque-là, Philippe Calon est en bons termes avec la famille grand-ducale et la Grande-Duchesse Maria Teresa en particulier. Il a d’ailleurs connu le père de la future monarque, qui lui aurait demandé un jour, Philippe s’en souvient, si «les Luxembourgeois acceptaient les étrangers».

L’amitié entre lui et la Grande-Duchesse dure toujours. «Elle aime les gens polis, pas les roublards», assure le boulanger. Le fait que Philippe Calon découvre un jour son amour pour Cuba est certainement pour quelque chose dans cette amitié, à moins que ce ne soit la Grande-Duchesse cubaine qui l’ait amené à s’intéresser à l’île et à ses peintres. Car Philippe Calon, le lecteur l’aura compris, n’est pas du genre à se laisser enfermer dans une case et si le boulanger s’intéresse à l’art, c’est qu’en plus de posséder la seule boulangerie logique et casher, Philippe est galeriste, boulanger-galeriste, le seul, ça s’entend.

Ce qui frappe d’ailleurs quand on passe devant la vitrine rue de Reims, c’est la relative absence de pain ou de pâtisseries par rapport à l’art. S’y bousculent pêle-mêle portraits de Fidel Castro et de Che Guevara à côté de peintures naïves d’artistes cubains en vogue que Philippe Calon, au détour de nombreux déplacements sur l’île des Caraïbes, a fini par connaître personnellement et choisis d’exposer et de vendre dans sa galerie «Painture».

Ses relations avec l’île remontent à ses activités «humanitaires» pour la communauté juive de Cuba, à une époque où les hôpitaux cubains étaient encore en piteux état. Philippe Calon, raconte-t-on, aurait même rencontré Fidel Castro. Lui-même reste évasif sur cet aspect de sa biographie, assurant n’avoir vu l’emblématique dictateur cubain, mort en novembre dernier, qu’une seule fois alors qu’il passait devant lui dans sa limousine.

Frédéric Braun

Boulangerie Philippe Calon – Galerie « Painture » : 3 rue de Reims à Luxembourg.

Un commentaire

  1. Olszewski Calon

    Le même Philippe CALN est resté pareil avec quelque années de plus. Il ne cuit plus que sur commande.
    Maiis il aime refaire le monde

PUBLIER UN COMMENTAIRE

*

Votre adresse email ne sera pas publiée. Vos données sont recueillies conformément à la législation en vigueur sur la Protection des données personnelles. Pour en savoir sur notre politique de protection des données personnelles, cliquez-ici.