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Turquie : purges à plein régime après la victoire d’Erdogan


Devant la prison de Sincan près d'Ankara, le 28 février 2017 où étaient jugés des putschistes turcs présumés. (Photo : AFP)

Les autorités turques ont arrêté plus de 1 000 personnes lors d’une nouvelle purge contre des partisans présumés du prédicateur Fethullah Gülen, dix jours après la victoire du président Recep Tayyip Erdogan au référendum renforçant ses pouvoirs.

Quelque 1 120 personnes soupçonnées d’appartenir au réseau de Fethullah Gülen, accusé par le gouvernement turc d’avoir ourdi la tentative de putsch de juillet, ont été arrêtées mercredi matin à travers la Turquie, selon l’agence de presse progouvernementale Anadolu. Au total, plus de 3 200 personnes à travers la Turquie sont visées par un mandat d’arrêt et 8.500 policiers sont mobilisés pour les interpeller, a précisé l’agence de presse.

Ce coup de filet, d’une ampleur inégalée ces derniers mois, survient dix jours après la victoire étriquée du président Erdogan à un référendum constitutionnel sur l’élargissement de ses prérogatives, dont la légitimité est remise en cause par l’opposition. Le principal parti d’opposition en Turquie, le CHP, a d’ailleurs annoncé mercredi qu’il allait saisir la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) pour contester le résultat du scrutin.

Avec ces arrestations et des bombardements menés mardi contre des combattants kurdes en Irak et en Syrie, Ankara semble vouloir montrer qu’il ne faiblira pas dans sa lutte contre le «terrorisme», à l’intérieur comme à l’extérieur des frontières. Cette nouvelle vague de purges se produit à trois semaines d’un déplacement de Recep Tayyip Erdogan aux États-Unis, lors duquel la demande d’extradition de M. Gülen devrait être abordée.

Le gouvernement turc a exhorté à plusieurs reprises Washington de lui renvoyer le prédicateur, qui vit reclus en Pennsylvanie (nord-est), mais ses demandes sont restées lettre morte. Selon le ministre de l’Intérieur turc Süleyman Soylu, les arrestations de mercredi visent à «nettoyer» les rangs de la police des éléments soupçonnés d’appartenir à la mouvance güléniste. «L’étape la plus importante des efforts visant à identifier et à détruire une structure qui s’est infiltrée dans notre police, qui cherche à contrôler notre police de l’extérieur (…) a été accomplie ce matin», a-t-il déclaré.

Bombardements en Irak et en Syrie

Les autorités turques accusent M. Gülen, un ancien allié du président Erdogan, d’être à la tête d’une «organisation terroriste» ayant infiltré les institutions pour construire un «Etat parallèle». Mais le prédicateur affirme diriger un réseau d’écoles, d’ONG et d’entreprises visant à promouvoir un islam progressiste et éclairé. Depuis le putsch manqué, plus de 46 000 personnes, notamment des policiers, des magistrats et des enseignants, ont été incarcérées et plus de 100.000 limogées ou suspendues.

Ces mesures ont suscité l’inquiétude d’ONG et de pays européens qui dénoncent une répression tous azimuts qui vise notamment les milieux prokurdes et des médias critiques. Après les interpellations de mercredi, le ministère allemand des Affaires étrangères Sigmar Gabriel a fait part de son «inquiétude» face à «ces arrestations de masse», et appelé à «respecter les mesures de l’Etat de droit».

Après sa victoire au référendum sur le renforcement de ses pouvoirs, les détracteurs de M. Erdogan redoutent une nouvelle dérive autoritaire du pouvoir turc. Peu après le scrutin, le gouvernement a décidé de prolonger l’état d’urgence en vigueur depuis le putsch manqué. Les dirigeants turcs affirment que le renforcement des pouvoirs présidentiels permettra de conduire plus efficacement la «guerre contre le terrorisme» menée sur trois fronts : contre les gülénistes, les jihadistes et les séparatistes kurdes.

La nouvelle purge survient au lendemain du bombardement par l’aviation turque de positions de forces kurdes dans le nord-est de la Syrie et dans la région de Sinjar dans le nord-ouest de l’Irak, qui a fait plus de trente morts. Les frappes ont visé les Unités de protection du peuple kurde (YPG) en Syrie et le Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK) et ses alliés en Irak. Les Etats-Unis, à la tête de la coalition internationale luttant contre le groupe Etat islamique (EI) en Irak et en Syrie, avaient exprimé leur «profonde préoccupation» après les bombardements turcs, mais Ankara a affirmé mercredi avoir préalablement informé les Etats-Unis et la Russie avant ses frappes. L’aviation turque a de nouveau bombardé mercredi des cibles du PKK dans le nord de l’Irak.

Le Quotidien/AFP

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