Un pont entre deux rives

Il s’appelle Puzzle comme il aurait pu s’appeler 3e Lieu. Le week-end dernier, cet espace de partage a été inauguré à Thionville. Vous savez, cette ville de l’autre côté de la frontière, centre commercial à ciel ouvert, quand on ne la qualifie pas de cité-dortoir pour frontaliers. Thionville, c’est le Linkling. Le I, mais aussi le II ou le III.

Cela pourrait devenir, demain, la ville du Puzzle. Car ce lieu, qui se veut connecté sans être impersonnel, est une réussite. Architecture lumineuse, ambiance chaleureuse, fonds documentaire ambitieux, le Puzzle offre à Thionville une visibilité perdue. La ville, coincée entre Luxembourg et Metz, cherchait depuis des années à montrer un autre visage. Cela n’aura pas été sans peine, sans polémique et sans un budget conséquent. Mais le résultat est là.

Demain, peut-être, les passants s’arrêteront, un instant ou un peu plus, au cœur de cette ville où l’on passe souvent sans se retourner. Ils s’installeront dans les canapés design, dans les alcôves confortables, pour boire un verre au bar, lire un livre ou se pencher sur un périodique. Les plus jeunes se lanceront dans des jeux vidéo aux bornes d’arcade qui fêtent les titres d’antan, ou alors rêveront avec des casques de réalité virtuelle. Ils pourront aussi caresser des plantes. Car au Puzzle, on caresse des plantes. Avant de grimper sur le toit panoramique.

Metz a son centre Pompidou, Luxembourg a son Kirchberg. Aujourd’hui, Thionville a son Puzzle. Un concept à son échelle, ambitieux sans être tape-à-l’œil, qui aura fait grincer des dents dans la ville endormie. Mais qui se pose maintenant comme un pont entre deux rives, comme une étape entre le Luxembourg et la France.

Si le Puzzle atteint son but, il rapprochera les habitants de Thionville, qui s’y croiseront à force de le fréquenter. Il rapprochera peut-être aussi ceux de la Grande Région, qui découvriront alors cette ville qui vaut plus qu’un simple arrêt au supermarché. Car il est bien plus agréable de remplir son âme que ses caddies, à Thionville.

Christophe Chohin (cchohin@lequotidien.lu)